Le 13ème jeu d’écriture que je propose aux abonnés de ma newsletter s’intitule “liponomie”. Que ceux qui ignorent le sens de ce mot ne s’inquiètent pas, cet article a pour but non seulement de vous l’expliquer mais également de vous proposer une démonstration. C’est parti !
Vous connaissez sans doute le lipogramme dont j’ai offert déjà plusieurs présentations. Eh bien, la liponomie ressemble à cet exercice d’écriture à la différence qu’il s’agit d’éviter l’emploi de certains mots et non de certaines lettres. Bien entendu, il trop serait facile d’écrire un texte sans y intégrer “éléphant” ou “topinambour”. J’ai donc proposé à mes abonnés de produire une description sans les verbes “être”, “avoir” et “faire” !
Pour réaliser ce jeu d’écriture, je me suis imposée la même contrainte supplémentaire que pour mes autres exercices : détourner la fable Le corbeau et le renard de Jean de la Fontaine. Pour finir, j’ai également utilisé la photo du chat au chapeau noir ! Voici mon texte :
Vol à l’étalage
Un chapeau d’un noir de jais couvrait sa tête ronde, un chapeau en forme de cloche agrémenté d’un ruban ton sur ton, un brin féminin. Vu de loin, le noeud ressemblait presque à un oiseau, un corbeau queue dressée, fièrement perché au sommet de l’édifice – aussi arrogant que ce marchand rencontré sur le marché- Ce qu’il complotait là-haut, nul ne le savait à l’exception peut-être de l’oreille pointue dressée à quelques centimètres de lui.
Le chapeau ne la laissait qu’à demi visible, comme si on trouvait plus à entendre à l’intérieur qu’à l’extérieur. L’oiseau noir n’émettait pas un son, pas plus que son compagnon. Seuls les yeux ronds de ce dernier, attentifs et tournés vers les sommets dénotaient des pensées qui l’agitaient. Un zeste prédateurs, un zeste calculateurs – comme tout à l’heure devant l’étalage de fromages de ce marchand décidément par trop arrogant !-
Des moustaches frémissantes partaient de chaque côté d’un petit nez rose. Quelles odeurs s’accrochaient donc à ce couvre-chef étrange ? Un reste de sel ramené de la plage sur laquelle ses pas félins aimaient s’enfoncer, s’attarder, se couler ; une senteur poivrée volée à une main caressée et, plus fort encore, le fumet alléchant de ce fromage chapardé au marché.
“- Oh qu’ils sont beaux, oh qu’ils sont bons ! criait encore le marchand dans son esprit. Sans mentir, si leur saveur unique se rapporte à leur texture magnifique, vous ne trouverez nul fromage meilleur sur le marché !”
Au coin de ses lèvres minces, un sourire moqueur. Ce marchand fier se trouvait maintenant bien attrapé ! Un coup de griffes, et hop…
“Tout chapardeur vit au dépend de celui qui croise sa route !” se dit-il en fermant les paupières.
Il se laissa emporter au gré des sentiers d’un sommeil bien mérité.
N’hésitez pas à me dire si vous trouvez dans mon texte l’un des verbes interdits : il n’est pas facile d’écrire en résistant à l’appel de ces mots si souvent utilisés !
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Crédit photo : HokutoSuisse